Les deux faces de ce métier


J’écris ces lignes à 9 h du matin, dans mon jardin, avec un café, en écoutant le chant des oiseaux dans les arbres.

L’herbe est encore pleine de rosée et il fait un peu frais, pas assez pour avoir froid, mais juste comme il faut pour aider à se réveiller.

C’est un plaisir de faire ce métier.

Je crois que je n’aurais rien pu faire d’autre qui puisse m’apporter autant de plaisir.

Ce qui est drôle, c’est qu’en discutant avec d’autres créateurs, on se rend compte que leur activité est à la fois la cause de beaucoup de leurs joies, et celle de beaucoup de leurs peines et frustrations.

C’est un métier extrême. Il peut nous faire vivre le meilleur comme le pire. Et il peut nous amener à donner le meilleur de nous-mêmes, comme à nous pousser à faire ce qu’on est capable de pire.

Il nous offre des plaisirs comme celui que je suis en train d’éprouver en écrivant ces lignes dans mon jardin. Et il nous donne beaucoup de petites fiertés, comme celle d’avoir finalisé un projet difficile, ou d’avoir réussi un lancement de produit…

Il nous permet aussi de ne pas vivre comme les autres. De gagner sa vie depuis sa table de jardin, depuis un hôtel à Bangkok ou depuis un siège de train, au lieu de passer sa vie dans un bureau ou une usine.

Il nous permet de décider du programme de chaque journée, de ne pas avoir à répondre à un patron, un chef ou un supérieur.

Mais il est aussi, la plupart du temps, la source d’une bonne partie de nos expériences négatives :

La frustration de ne pas avoir eu les résultats qu’on escomptait, ou bien celle de ne pas avoir l’énergie nécessaire pour accomplir toutes les tâches qu’on s’était fixées.

Celle, aussi, de devoir publier nos contenus sur des plateformes qui travaillent de plus en plus contre notre intérêt et celui du public.

Celle, parfois, d’avoir l’impression de faire partie d’une profession qui devient la risée du monde entier, à cause du genre de contenus qui sont mis en avant par ces mêmes plateformes.

La frustration de ne jamais pouvoir tout faire, de ne jamais pouvoir exploiter toutes les possibilités qui s’offrent à nous, de ne jamais pouvoir essayer tous les outils, tous les formats… Parce qu’il y en a trop, et qu’on a assez de pain sur la planche avec le peu qu’on fait déjà.

Celle, aussi, pour certains, de ne plus avoir de temps pour eux, et de voir défiler les mois et les années avec l’impression d’avoir loupé une partie de leur vie, parce qu’ils sont restés scotchés devant un écran au lieu de regarder grandir leurs enfants, de profiter de leurs amis et de tous ces moments qui leur ont filé entre les doigts parce qu’ils travaillaient trop.

Ce métier, il a changé des vies pour le meilleur, mais il en a aussi détruit. Il a brisé des familles. Déchiré des destins.

Entre ceux qui sont victimes d’un déferlement de haine et qui sont harcelés sur Twitter ou ailleurs, avec un hashtag à leur nom et les journalistes au cul…

Ceux que le succès a rendus cons et qui sont devenus l’ombre d’eux-mêmes, que même leurs proches ne reconnaissent plus…

Ceux qui ont sombré dans les addictions dures pour essayer d’échapper au stress…

Ceux qui sont devenus des no-life et qui ont renoncé à toute perspective de vie personnelle pour pouvoir travailler jour et nuit…

Ceux qui sont devenus des ordures, qui étaient des gens bien autrefois, mais qui se sont laissés corrompre par la cupidité et le goût du pouvoir…

Ce métier, il peut amener le meilleur comme le pire dans nos vies.

C’est pour ça qu’il est important de prendre un peu de recul de temps en temps et de se demander où l’on est vraiment en train d’aller, au lieu de se limiter à regarder ses statistiques…


📷 La photo du jour :

Matinée ordinaire à la maison.


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